Les écritures du séisme – émission spéciale Livres 9

12 janvier 2010 – 12 janvier 2025 : 15 années depuis qu’Haïti a été frappée par un séisme dévastateur ayant fait des milliers de morts et détruit principalement sa capitale, Port-au-Prince. 15 ans après, le pays peine encore à se (re)mettre debout. Les promesses de la reconstruction – à la fois des corps et des infrastructures – n’ont pas été tenues. Aujourd’hui encore, il est difficile de sortir de cette zone tant il est difficile pour les uns et les autres d’enterrer cette histoire et de faire, une fois pour toutes, le deuil. Cela dit, les Haïtiens continueront longtemps à vivre avec cette blessure et porteront les cicatrices « comme on porte une fleur à son corsage »[1], pour parodier Carl Brouard.

S’il est vrai que l’événement soit de l’ordre de l’inintelligible et l’évoquer (r)éveille à chaque fois des souvenirs douloureux, les écrivains sont probablement de ceux qui soient les plus capables de dire, avec les mots justes, cette chose qui, en ce mardi du 12 janvier, a enlevé cette partie de nous-même. Comment donc évacuer ce trop-plein de douleur, cette forme d’inertie qui s’est, depuis, emparée de nous ?Quelle fiction faire[2] pour sortir de cette impasse et tenter une cure réparatrice des saignements et des sanglots qui ont impacté les corps et les imaginaires ?

Le propre même de la littérature, c’est de dire l’indicible, raconter l’inénarrable, nommer l’innommable et d’« ancrer l’immédiat dans une profondeur mémorielle »[3]. De 2015 à aujourd’hui, un nombre important de textes littéraires ont vu le jour autour de cet événement qui a provoqué « une véritable fracture dans l’histoire haïtienne contemporaine, désormais marquée par une époque avant le séisme et une époque post-sismique »[4]. En 2016, dans le cadre des 6 ans du séisme, nous avions réalisé une émission spéciale qui donnait à lire et à entendre des textes évoquant la catastrophe dans le cadre de l’émission littéraire Livres 9.

En guise de commémoration de ces 15 ans, nous prenons plaisir à rediffuser cette émission faisant partie de toute une série.

[1] Carl Brouard, « Solitude », Pages retrouvées, Port-au-Prince, Éditions Panorama, 1963, p. 17.

[2] Jean-Claude Charles, Quelle fiction que faire ? Notes sur la question littéraire haïtienne, Port-au-Prince, Mémoire, 1999.

[3] Yolaine Parisot, « L’écrivain-journaliste dans la fiction Haïtienne ultra-contemporaine », Mélanie Joseph-Vilain et Judith Misrahi-Barak, Another Life, (ed.), Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, 2012), pp. 61–77,

[4] Alessia Vignoli, Le roman post-sismique en Haïti : une écriture post-contemporaine de l’extrême », KWARTALNIK NEOFILOLOGICZNY, vol. 3, nLXV, 2018, p. 353.


Pour approfondir :

Wébert Charles, « Les écritures du séisme », Libre de lire, 12 janvier 2019. Un article qui propose, tous genres confondus, une lecture de onze fictions du séisme.  

Collectif, …des maux et des ruesPort-au-Prince, LEGS ÉDITION, 2014. Un recueil de récits collectif de 14 écrivains, preface par un historien, qui entend « maintenir la ville et les souvenirs de s[c]es rues en vie ».

Alma Abou Fakher, Mourad Loudi, Écritures, Pandémies et Catastrophes naturelles. Legs et Littérature no 16, 2020. Un numéro de revue qui interroge la mise en scène du pathos dans l’analyse de la fiction du désastre.

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