Corps et Politique
L’Association Legs et Littérature (ALEL) lance un appel à contributions pour le 21e numéro de la revue Legs et Littérature consacré à la thématique Corps et Politique qui paraîtra en octobre 2023 chez LEGS ÉDITION sous la direction de Alma Abou Fakher. Date limite : 21 janvier 2023
Argumentaire
Le contrôle politique de la corporéité humaine a impliqué plusieurs champs disciplinaires dans le monde occidental. Dans La sociologie du corps, David Le Breton affirme que « l’action du politique sur la corporéité en vue du contrôle du comportement de l’acteur est une donnée centrale de la réflexion des sciences sociales dans les années 1970 »[1]. L’emprise du pouvoir politique sur le corps est minutieusement étudiée par Michel Foucault dans Surveiller et punir. Naissance de la prison, qui instaure, dès sa publication en 1975, une rupture d’ordre épistémologique avec la pensée politique marxiste qui « fait de l’appareil d’État l’instance suprême d’un pouvoir de classe »[2] . La pensée foucaldienne met l’accent sur un dispositif d’ « anatomie politique du corps humain »[3] qui permet au pouvoir de contrôler les attitudes des sujets dans les détails les plus infimes.
Les mutations sociopolitiques soulèvent certes des interrogations sur le rôle de la littérature dans la dénonciation des idéologies politiques et de l’emprise exercée, sur les sujets, par les régimes en place. L’investissement du corps, par les auteurs contemporains, s’inscrit dans une démarche de révélation des dispositifs de manipulation des sujets en les orientant dans une direction qui favorise la subordination à l’autorité politique dominante.
Ce numéro de Legs et littérature s’intéresse à la corrélation entre le corps et le pouvoir politique dans la littérature contemporaine. L’ambition de ce numéro est d’explorer la problématique de l’impact de l’autorité politique sur la corporéité humaine telle qu’elle se manifeste dans la production littéraire contemporaine. Il est question également d’opérer une archéologie des imaginaires sociaux et culturels de la constitution des différentes formes de corporation : du corps politique, du corps social et de l’épiderme dans les représentations que l’on (se) fait des corps depuis les expériences migrantes, la mission civilisatrice de la colonisation jusqu’au body art. Quelles relations s’entretiennent-elles entre l’existence physique des sujets au sein du corps social et le pouvoir politique qui régit et organise cette société ? Comment la littérature interroge-t-elle les représentations du rapport entre le corps et l’autorité politique ? Quels sont les mécanismes de défense, de libération et d’affranchissement du sujet face à l’emprise du pouvoir ? Il s’agit donc de déterminer et décrypter les relations complexes qui relient la corporéité humaine à toute forme de domination d’ordre politique.
Ces pistes n’ont pas la prétention d’être exhaustives. Aussi, la Revue Legs et Littérature encourage les contributeur.rice.s à explorer d’autres aspects de la question et espère, par les différentes propositions, dégager une vision d’ensemble du sujet en s’attardant même à des domaines insolites qui sont peu ou pas abordés par la critique. Alors que toute étude interdisciplinaire et/ou comparative de cette thématique est souhaitée, les contributeur.rice.s peuvent résolument s’inspirer des axes suivants dans leurs propositions.
Axes principaux :
Axe 1 : Intersections entre corp(s) et politique dans la littérature contemporaine : Quelles sont les représentations du corps en (sa) relation avec le pouvoir politique dans la production littéraire contemporaine ? Le corps est-il envisagé en tant qu’outil d’asservissement, d’assujettissement et de subordination, ou bien est-il considéré comme instrument de rébellion, de changement et de révolution ? Quels sont les (en)jeux entre l’existence physique des sujets et l’ordre politique dominant ? Et quels sont les éventuels mécanismes d’émancipation tels qu’ils se manifestent dans la fiction ?
Axe 2 : (Re)penser la notion du « corps politique » : Quelles dimensions acquiert la représentation du corps politique dans la littérature contemporaine ? Comment cette notion est mise en mots et en images ? Le corps politique peut-il se retrouver incarné dans le corps du dirigeant et quelles perspectives porte cette incarnation ? Quel rôle joue le symbolisme dans l’ancrage du corps politique dans l’écriture ? Comment l’image corporelle est-elle exploitée pour décrypter le fonctionnement du système politique ?
Axe 3 : Le corps comme médiateur de la communication politique : cet axe est focalisé davantage sur le corps du politique, son visage, sa voix, ses gestes, ses attitudes, ses emportements, ses inflexions, et tout ce qui relève du registre de l’expression corporelle. Le corps du politique est-il représenté comme outil communicatif ou bien comme entrave à la communication ? Peut-il constituer un signal de la force du dirigeant ou bien il restreint, par ses limites, son ambition politique ?
Axe 4 : Corps, politique et désir : Quelles représentations sont faites du corps féminin ainsi que du corps masculin dans les pratiques de socialisation politique ? Comment le politique se sert-il de son pouvoir d’agir pour asservir le corps ? Comment le corps fait-il naître le désir dans le paysage politique ? Le corps comme objet de désir dans la manifestation du pouvoir politique ? Le corps peut-il jeter le trouble dans la politique ou la réorienter ?
Axe 5 : Le corps, ses normes et ses couleurs : Le corps peut-il exister en dehors des schèmes de la coloration ? L’être serait-il constituable hors-mi l’expérience de la corporéité ou de son épiderme ? Comment hérite-t-on du capital épidermique ou de son corps dans l’espace politique ? Comment la ou le politique interroge-t-elle le corps et ses couleurs ? Quelle (s) couleur (s) prend le corps dans l’arène politique ? Existe-t-il un ou des normes(s) du corps ? Comment le corps peut-il transgresser les normes ?
Axe 6 : Corps, stigmates et répression : Le corps en prison, quelle (s) représentation (s) ? Quelle politique du corps dans la prison ? Comment le corps est utilisé comme instrumentalisation de la violence politique ? Comment le corps tatoué peut-il subir ou hériter de la stigmatisation ? Comment le corps subit et/ou résiste-t-il à la répression en temps de dictature ?
Protocole de présentation et de soumission des textes :
L’auteur devra envoyer sa proposition de contributions par courrier électronique en format Word tout en indiquant (1) son nom ou pseudonyme, le cas échéant, (2) son titre universitaire, (3) le titre du texte ou les premiers mots de chaque texte (4) sa notice biobibliographique ne dépassant pas 100 mots, (5) un résumé (Abstract) du texte ne dépassant pas 200 mots.
Longueur des textes :
– 4 000 à 6 000 mots pour les réflexions, les textes critiques portant sur une œuvre
littéraire.
– 1 000 à 1 200 mots pour les notes ou comptes rendus de lecture.
– 1 000 à 1 500 mots pour les portraits d’écrivain.e.s
– 1 500 à 2 000 mots pour les entretiens avec des écrivains, critiques littéraires et
chercheurs.
– Poèmes ou nouvelles en français : maximum 5 pages ou 5 poèmes.
La police de caractères exigée est le Times New Roman, taille 12 points, à un interligne et demi, et une taille de 10 points pour les notes de bas de page, police de caractère, Calibri.
- Titre du texte : le titre doit être en gras avec les titres des œuvres en italique. S’il comporte deux parties, utilisez deux points au lieu du soulignement. Les titres de l’article et des paragraphes ne sont jamais suivis d’un appel de note.
Ex : Chauvet et Faulkner : cas d’intertextualité.
Les références : toute citation doit être associée à une note de bas de page. Les citations de moins de 5 lignes sont intégrées au texte et indiquées par des guillemets –sans italique. Allez à la ligne et utilisez l’alinéa pour les citations de plus de 5 lignes. Dans ce cas, il n’y a ni guillemets ni italique. Veuillez indiquer les références en bas de pages (Prénom, nom de l’auteur, titre du livre en italique, ville d’édition, éditeur, année de publication).
Ex : Marie Vieux-Chauvet, Fille d’Haïti, Paris, Zellige, 2014.
- Les coupures à l’intérieur d’une citation sont signalées entre crochets droits […]. Si le début de la citation manque, le premier mot suivant les crochets est écrit en
Les signes de ponctuation suivent les crochets. - Toute intervention dans une citation est signalée entre crochets droits [ ].
Bibliographie, Livres : Indiquer le nom de l’auteur (maj.), prénom (min.) suivi
du titre de l’ouvrage en italique, ville d’édition, éditeur, année de publication.
Ex : VIEUX-CHAUVET, Marie, Fille d’Haïti, Paris, Zellige, 2014.
S’il s’agit d’un livre publié plus d’une fois, il faut préciser l’édition consultée et l’année de la première publication mise entre crochets précédée du titre.
Ex : VIEUX-CHAUVET, Marie, Fille d’Haïti [1954], Paris, Zellige, 2014.
- Titre cité dans la note précédente : Ibid., p.
- Titre déjà cité : cit.
- Quand il est nécessaire, utilisez cf., non pas voir.
Chapitre d’un livre : Nom de l’auteur (maj.), Prénom (min.), titre du chapitre (entre guillemet), titre de l’œuvre (italique), ville, édition, année de publication, pages consultées.
Ex : GENETTE, Gérard, « Frontières du récit », Figures II, Paris, Seuil, 1969, pp. 49-69.
Article de revue : Nom de l’auteur (maj.), Prénom (min.), titre de l’article (entre guillemet), nom des directeurs du numéro, nom du magazine, journal ou revue (en italique), volume, numéro, année de publication, pages consultées.
Ex : LAHENS, Yanick, « Chauvet, Faulkner : cas d’intertextualité », Carolyn Shread, Wébert Charles (dir.), Revue Legs et Littérature 4, janvier 2015, pp. 65-82.
Dates à retenir
Délai d’envoi des propositions : 21 janvier 2023
Réponse du comité : 15 février 2023
Soumission du texte final : 15 juillet 2023
Envoyez vos propositions avant le 21 janvier 2023 à alma.aboufakher@inalco.fr et legsedition@outlook.com
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[1] David Le Breton, La Sociologie du corps, Paris, PUF, 2002, p. 98.
[2] Ibid., p. 101.
[3] Michel Foucault, Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975, p. 195.
Bibliographie indicative
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_____, The Wisdom of the Body, New York, W. W. Norton & Company, 1932.
DELEUZE, Gilles, La logique du sens, Paris, Minuit, 1969.
DETREZ, Christine, La construction sociale du corps, Paris, Seuil, 2002.
FOUCAULT, Michel, Naissance de la biopolitique, Paris, Seuil, 2004.
_____, Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975.
LE BON, Gustave, Psychologie des foules, Paris, F. Alcan, 1895.
LE BRETON, David, La sociologie du corps, Paris, PUF, 2012.
MARZANO, Michela, La philosophie du corps, Paris, PUF, Paris, 2016.
ONFRAY, Michel, Théorie de la dictature, Paris, Robert Laffont, 2019.
POULANTZAS, Nicos, L’État, le pouvoir, le socialisme, Paris, Les prairies ordinaires, 2013.
RANCIÈRE, Jacques, Politique de la littérature, Paris, Galilée, 2007.
VIGARELLO, Georges, Le corps redressé, Paris, Armand Colin, 2004.
Revues et articles
ABOU FAKHER, Alma, « Corps et politique dans le roman arabe contemporain : entretien avec David Le Breton », Littérature et Politique. Legs et Littérature n°14, vol I, 2019, pp. 283-293.
_____, « Écriture du corps et politique dans le roman arabe contemporain : figures emblématiques », Littérature et Politique. Legs et Littérature n°14, vol II, 2019, pp. 255-272.
_____, « La corporéité dans La file d’attente de Basma ʿAbd al-ʿAzīz. Entre attente et despotisme », LICARC n°6, 2018, pp. 99-110.
_____, « La corrélation entre corps et politique : contrepoint satirique. Dans Silence et Tumulte de Nihād Sīrīs », LICARC n°8, 2020, pp. 65-76.
_____, « Les implications sociopolitiques du corps démesuré dans Frankenstein à Bagdad d’Aḥmad Saʿdāwī », Imaginaires, Légendes et Croyances populaires. Legs et Littérature n°15, 2020, pp. 146-160.
BERRADA, Mohamed, « Littérature politique ou autorité fictive ? », Tumultes n°6, 1995, pp. 153-158. [URL : https://www.jstor.org/stable/24600008]
CAILLE, Alain, « pouvoir, domination, charisme et Leadership », Revue de Mauss n° 47, 2016, pp. 305-319. [URL : https://doi.org/10.3917/rdm.047.0305]
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DENOOZ, Laurence (dir.), Corps et désordre dans le monde arabe, LiCArC (Littérature et culture arabes contemporaines), Hors-série, Paris, Classique Garnier, 2021.
DUBOR, Françoise, « La foule à venir », Cahiers FoReLLIS – Formes et Représentations en Linguistique, Littérature et dans les arts de l’Image et de la Scène, 2013.
[URL: https://cahiersforell.edel.univ-poitiers.fr:443/cahiersforell/index.php?id=268]
LE BRETON, David, « Le recours au corps en situation de souffrance », Douleurs n° 5, 2004, pp. 283-287. [URL: https://www.em-consulte.com/article/82115/article/le-recours-au-corps-en-situation-de-souffrance]
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